Trilogie du revoir

Texte français Claude Porcell / Scénographie et costumes Jean-Paul Chambas 

Avec Rüdiger Vogler, Andrzej Seweryn, Claude Degliame, Christine Boisson, Laurence Bourdil, Muni, Axel Bogousslavsky, Serge Avedikian, Suzel Goffre, Jean-Paul Roussillon, Maurice Teynac, Jean-Pierre Moulin, Laurence Février, Jean-Claude Dreyfus, Charles-Antoine Decroix, Laurence Février, Raymond Jourdan, Julien Dubois / Guillaume Meny

La planète sèche

Entre marée noire et atomisation – la terre qui nous est promise – l’homme patauge et s’effraie, car déjà meurent les oiseaux englués et les poissons à l’envers, ou simplement les voisins homoïdes des centrales fissurées. Parmi les autoroutes et leurs échangeurs les grandes surfaces ont jailli des ruines, et pour mieux reconstruire on a continué à démolir après la guerre, le pli était pris, l’enrichissement des promoteurs. Pendant ce temps sur des déserts et des plages de rêve commencent à s’entasser les ruines coriaces du matérialisme athéiste et une barque s’échoue – éventrée, elle faisait eau de toute part – celle du rationalisme éberlué, un coup dur pour la France, comme on dit elle n’en revient pas, elle reste sur le carreau –

– c’est la fin de beaucoup « d’ismes ».

En même temps encore, l’Église tente de profiter d’un retour à la spiritualité qui ne lui demandait rien. Et, comme au Moyen Âge, elle entend exploiter la peur. Le pouvoir fait de même, il ne veut pas rester en reste, et pour cela, faute de savoir les combattre, il laisse s’amplifier ou organise les catastrophes.

On essaye d’avancer en marchant en arrière et tout à coup d’énormes distances sont franchies, mais pas celles qu’on croyait et on ne sait pas dans quel sens. On se trouve loin, projeté dans un vide où tout peut prendre place, ou rien. 

Dans ce monde où les formules se refilent comme le prêt-à-porter, où retrouver la « sensation vraie » (Handke), comment faire entendre un « mot », inventer une autre « relation ».

[…]

Seulement aujourd’hui le parler ignorant passe par le porte-à-faux du faux savoir. L’innocence est infestée. Une nouvelle bêtise est née, à la dimension de notre monde, d’un monde fabriqué par la science des spécialistes, le doigt sur un bouton…

Dans cette bêtise branchée sur des médias fascinants, l’ombre de Hitler, plus vivace que sa personne vivante, s’infiltre et prolifère. Lentement c’est la planète sèche qu’elle pénètre comme un liquide. Malgré / ou à cause de (société suicidaire) la honte et malgré les incessants combats…

Claude Régy