©Koichi Miura

Intérieur

Création en Japonais / Texte japonais Yoshiji Yokoyama / Scénographie Sallahdyn Khatir / Lumière Rémi Godfroy (création), Pierre Gaillardeau (reprise 2014 et tournée) / Costumes Sallahdyn Khatir et Mai Ooka / Assistant à la mise en scène Alexandre Barry

Avec Soichiro Yoshiue, Yoji Izumi, Asuka Fuse, Miki Takii, Tsuyoshi Kijima, Haruyo Suzuki, Kaori Ibii, Mana Yumii, Gentaro Shimofusa, Hiroko Matsuda, Yusuke Obe, Hibiki Sekine

C’est le soir et on voit, à travers des fenêtres, une famille vivre là. Elle semble tranquille. Mais ne s’agit-il pas, au-delà des parois dont ces vivants sont entourés, de rendre visible ce qui se cache à l’intérieur de cette "mer de ténèbres" dont parle Maeterlinck, cette zone faite de cavités secrètes en nous qui semblent inatteignables parce qu’elles dépassent aussi bien la vie consciente que la vie inconsciente. Une cavité noire émet de la lumière. Et ose parler de ce que, de toutes nos forces, nous occultons : la mort. La mort d’une enfant de cette famille-là. Cette famille si calme dans l’apparence du bonheur. Un convoi, une civière qui transporte une jeune morte, sont en route et, inexorablement, s’approchent de la maison. Et d’ailleurs ce calme de la famille dans la maison n’est-il pas troublé, sans qu’on le sache, par la prémonition que la mort de l’un d’entre eux vient de se produire là, tout près, cette nuit même. Cette jeune morte, peut-être, a voulu sa mort. Elle a choisi de mourir par l’eau, noyée. Dans la maison un petit enfant dort et l’arrivée de la civière ne le réveillera pas, tant est forte l’analogie du sommeil et de la mort. Ce convoi en route c’est le cheminement de la mort en nous. Maeterlinck associe une parole proche de nous dans l’espace à une image plus lointaine qui, elle, est parfaitement muette. Il rend ainsi très sensible la coexistence de la vie et de la mort. Les deux forces se contrarient et, se contrariant, elles forment une sorte d’alliance, une force nouvelle. Intérieur donne vie et image à cette coexistence essentielle de la vie et de la mort, loin de la peur aveugle. C’est peut-être la force majeure de Maeterlinck : il nous initie à un monde où l’on peut percevoir au-delà de l’intelligible. 

Claude Régy, mars 2013