©Pascal Victor

Comme un chant de David

D'après les Psaumes / Traduction Henri Meschonnic Scénographie et costume Sallahdyn Khatir / Lumière Joël Hourbeigt / Son Philippe Cachia / Assistant à la mise en scène Alexandre Barry

Avec Valérie Dréville

L’enfant, avec un seul caillou au fond de sa fronde, vainqueur d’un guerrier colossal couvert d’airain, témoigne d’emblée d’une force autre. C’est 1000 ans avant le Christ. Cet enfant, c’est David, dernier né d’une famille de Bethléem. Il est berger, mais sa victoire en fait un soldat, il deviendra chef militaire et bientôt grand conquérant. Un jour il s’emparera de Jérusalem et, tout près, d’une forteresse du nom de “Sion” où il veut résider. Ce sera la cité de David. Sion désignera un jour toute la ville de Jérusalem et même le pays d’Israël tout entier. Guerrier devenu roi, poète et musicien, et avant tout représentant de Dieu, choisi par lui, David ose (psaume 2) se nommer fils de Dieu. Il est le premier à avoir réuni ensemble les 12 tribus d’Israël. Il est à l’origine d’un grand problème théologique. Pourquoi le dieu de David — se demande-t-on sans qu’autour de nous se rompe le silence — pourquoi ce dieu si intervenant en ces temps anciens n’est-il plus intervenu dans l’histoire moderne du peuple juif, extension de la diaspora jusqu’en Amérique, et surtout shoah, sionisme, fondation de l’Etat d’Israël, avec en Palestine guerres, transferts de populations, camps, terrorisme. Est-ce encore et toujours la volonté de Dieu qui s’exerce. Dans les déserts le pain et la viande ne tombent plus du ciel. Les prophètes Samuel, Nathan, Gad informaient David des volontés de Dieu, jugements, colères, encouragements, toujours pour des actions précises. En Dieu, David trouvait sa force militaire. Il fallait imposer un seul Dieu, Yahveh, et imposer son unicité contre le culte démultiplié des idolâtries. Qui aujourd’hui répond aux invocations de David. L’absence de réponse fait entendre les poèmes de David comme éventrés, entrouverts, rendus à eux-mêmes, écorchés dans le temps d’aujourd’hui. Les Chrétiens chantent les Psaumes. Le Christ, nu sur la croix, dit, mourant, la première ligne du Psaume 22 : “Mon Dieu mon Dieu pourquoi m’as-tu abandonné”, que Meschonnic traduit avec exactitude “Mon Dieu mon Dieu à quoi m’as-tu abandonné”. L’Islam aussi connaît les Psaumes. Guerres, intolérances, persécutions, destructions, trois religions jaillies de la même origine, là, à Jérusalem, abandonnées à la guerre depuis 2000 ans. La guerre durait déjà depuis 1000 ans : en effet, après les règnes de David et de Salomon, Israël, divisé, est vaincu (avec pillages et déportations) par les Assyriens, puis les Babyloniens (actuel Irak). La Palestine est ensuite colonisée par les Perses, les Grecs, les Romains, et pour finir par les Ottomans (les Turcs) de religion islamique.

La constante de ces 30 siècles, c’est la guerre.  

Claude Régy